Écrit par f. Maximilien

25 mars 2025 – Annonciation du Seigneur

Il n’en est pas de ce récit de l’Annonciation du Seigneur comme d’un conte merveilleux pour enfants. D’ailleurs, ce n’est pas par le « il était une fois » de nos contes d’enfance que débute l’Évangile lu au cours de l’assemblée liturgique. Mais par un « en ce temps-là » a résonné. Les plus anciens se souviennent certainement de l’introduction latine in illo tempore, que la traduction liturgique a heureusement rendu désormais par la locution « En ce temps-là ». « En ce temps-là, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, à une jeune fille vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph ; et le nom de la jeune fille était Marie ».

Ce trois petits mots, in illo tempore – en ce temps-là, ont l’air bien insignifiants. Pourtant, ils sont bien plus qu’un simple procédé littéraire permettant d’ouvrir un récit évangélique. Ils n’apparaissent pas dans le texte évangélique lui-même. Ils sont donc un ajout au texte de la Bible lorsque ce dernier est proclamé dans le contexte liturgique. Ce in illo tempore, qui ne paye pas de mine, est en réalité de grande importance pour nous.

Tout d’abord, l’incise in illo tempore nous renvoie immédiatement à l’œuvre merveilleuse de salut que Dieu a opérée pour nous en son Fils Jésus. C’est en tout vérité que le Verbe a pris chair de la Vierge Marie. L’incarnation du Verbe de Dieu a eu lieu « en ce temps-là », au moment opportun que Dieu avait choisi, car c’était le meilleur moment. La suite du verset, d’ailleurs, nous précise où l’annonciation a eu lieu : à Nazareth en Galilée ; il nous présente aussi avec précision l’identité de la jeune fille : elle s’appelle Marie, et elle était fiancée à un homme de la tribu de David nommé Joseph. Ce récit évangélique, comme tous les récits ayant trait à la vie du Christ, ne sont pas des contes pour enfants. Ça n’est pas « il était une fois Jésus ». Mais c’est vraiment : « en ce temps-là, le Verbe de Dieu s’est incarné en toute vérité en Marie ». Les événements de la vie du Christ sont enracinés dans le temps et dans l’histoire des hommes. Ainsi, dans un premier temps, le in illo tempore tourne nos regards et notre contemplation vers le Christ réellement incarné. Notre foi est ancrée dans un récit : le Christ s’est incarné, il est mort et il est ressuscité.

En outre de ce récit évangélique, sur lequel est fondé notre foi en l’incarnation, nous en sommes rendus contemporains. Par la liturgie que nous célébrons nous faisons mémoire de ce moment unique de l’histoire du salut où le Verbe a pris chair en Marie, et, dans le même mouvement, l’incarnation du Verbe de Dieu s’accomplit aujourd’hui, ici et maintenant, dans ce moment unique de l’histoire du salut que nous sommes en train de vivre. Le in illo tempore rend visible l’aujourd’hui de Dieu. « En Dieu il n’y a ni passé ni avenir. Dieu est présence. Nous écoutons donc ce qui est arrivé “en ce temps-là” parce que ce récit contient la promesse et l’annonce de ce que Dieu continue de vouloir faire pour nous qui l’écoutons maintenant nous parler[1] ». Ce soir, aux Vêpres, nous chanterons une antienne par laquelle nous exprimons cela : « Avec l’Ange, nous te saluons, Marie, comblée de grâce ! ». C’est aujourd’hui que l’ange porte l’annonce à Marie et nous la saluons, nous aussi. Tout comme le soir de Noël, nous chantions aux Vêpres : « Aujourd’hui, le Christ est né ; aujourd’hui, le Sauveur est apparu ; aujourd’hui chantent les justes, pleins de joie ».

Chaque 25-mars, nous fêtons l’Annonciation du Seigneur ; chaque année, nous faisons mémoire de l’événement unique de l’incarnation du Verbe qui s’est accompli dans le temps et dans l’histoire « en ce temps-là ». Mais de quelle manière vivrons-nous ce 25 mars 2025 comme un jour unique de l’histoire du salut où le Verbe s’est incarné pour nous ? Ne quittons pas cette église, ce midi, sans emporter au fond de nous un petit trésor : en entendant ce récit évangélique, que je connais pourtant par cœur, et porté par cette célébration eucharistique unique, qu’est-ce qui naît dans mon cœur aujourd’hui ? En quoi cette Annonciation 2025 changera ma vie ? Comment va prendre forme le « Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté » de Marie et du Christ ?


[1] J.-Cl. Reichert, « In illo tempore », Caecilia, 2015/2, p. 49.