28 août 2025 – Solennité de notre père saint Augustin
Saint Augustin est un promoteur de la marche ! Si vous cherchez une spiritualité du chemin, c’est à lui qu’il faut vous adresser. C’est à marcher qu’il nous invite et que je voudrais vous y inviter aujourd’hui. Il le fait principalement à travers la réflexion sur les deux grands mystères de la foi chrétienne : l’Incarnation et la foi en Dieu Trinité.
L’Incarnation tout d’abord.
L’être humain fait tôt ou tard, de manière plus ou moins dramatique, l’expérience de la fragilité de la condition humaine, la sienne, celle des autres. Nous sommes des êtres fragiles, c’est-à-dire capables de céder au mal qui peut détruire, briser en nous un bien précieux, nous mettre à terre. Cette expérience risque de nous tétaniser, de nous immobiliser, de nous désespérer.
Mais c’est précisément pour et dans cette fragilité que le Christ est venu jusqu’à nous, lui le Verbe fait chair. Dieu, dans l’Incarnation, « assume la fragilité humaine », dit saint Augustin. Comment l’assume-t-il ? Non pas en la supprimant, mais en ce faisant chemin, vérité et vie. Chemin pour aller jusqu’à nous, puisqu’il est devenu homme et l’un de nous. Chemin pour que nous allions jusqu’à lui, puisqu’il est aussi la vérité et la vie, car il est Dieu. Chemin pour que nous marchions.
La fragilité humaine n’est pas, pour saint Augustin, une invitation à marcher comme sur des œufs, dans la peur. Mais il dit au contraire dans un sermon (Dolbeau 7, 4) : « Ayez à l’esprit, mes frères, la fragilité humaine : courez tant que vous vivez, afin de vivre ; courez tant que vous vivez afin de ne pas mourir vraiment » c’est-à-dire mourir spirituellement par le mal.
En s’incarnant, le Christ n’est pas venu supprimer notre fragilité humaine, mais il nous permet de faire de cette fragilité un chemin vers la sainteté, vers la justice. « Jésus marche sur les eaux de la fragilité humaine pour nous donner d’avancer là où l’on ne pouvait plus marcher mais seulement couler », dit Jean-Louis Chrétien dans un bel ouvrage sur la fragilité.
La seconde invitation à marcher est liée à la foi en Dieu Trinité, Dieu qui a créé l’homme à son image.
Saint Augustin a beaucoup médité sur l’image de Dieu dans l’homme. Qu’est-ce qui est le signe que l’homme est un être créé à l’image de Dieu ? C’est précisément le mouvement, l’élan vers Dieu qui l’anime. Comme le dit une traduction la règle : ayez un cœur et une âme tendus vers Dieu. Il y a l’idée de mouvement. C’est donc encore la marche, la mise en route dont il est question. Nous sommes attirés vers Dieu parce que Dieu nous a fait à son image, nous lui ressemblons.
A travers les trois grandes facultés de l’âme humaine créée par Dieu que sont la mémoire, l’intelligence et la volonté, Dieu nous attire vers lui, pour que nous puissions trouver tout notre bonheur et toute notre joie en Dieu, dans la communion avec lui, dans la participation à sa vie.
Dieu nous a fait capable de nous souvenir de lui par la mémoire, de le connaître par l’intelligence et de l’aimer avec notre volonté.
Mais bien souvent, nous occupons notre mémoire, notre intelligence et notre volonté à autre chose que lui. Alors nous arrêtons de marcher. Tel est le paradoxe ! Marcher, spirituellement, cela ne veut pas dire être toujours en train de courir à droite et à gauche sans jamais se poser. Cela veut dire orienter tout notre être intérieur vers Dieu qui nous attire à lui. Comme dit saint Augustin à Dieu dans la prière qui conclut les Confessions : « Qu’on te demande à toi, que l’on recherche en toi, que l’on frappe chez toi ! »
Parce que nous sommes fragiles, la relation de tout notre être avec Dieu est blessée, mais le Christ est venu jusqu’à nous pour restaurer cette relation et nous remettre en route. Ne cessons donc pas de marcher. Marchons ensemble, de tout notre être.
« Chante et marche ! » nous dit encore saint Augustin.
Amen !
Fr François-Marie