Chanoines réguliers de Prémontré
21
Juin
S. Louis de Gonzague
Écrit par F. François-Marie

8 juin 2025 – Pentecôte

Assurément, nous attendons beaucoup de l’Esprit Saint. Oui, nous attendons beaucoup de lui, nos chants, nos prières, abondent de demandes multiples : que ce soit les chants à l’Esprit Saint d’aujourd’hui, issus souvent du renouveau charismatique, ou ceux d’hier tels que le Veni Creator Spiritus et le Veni Sancte Spiritus. Au point de s’interroger même car nos invocations à l’Esprit Saint peuvent sembler parfois partir un peu dans tous les sens. Mais quand y regarde de plus près, ces demandes, expressions de la piété populaire, se déploient dans des registres assez précis, trois en particulier.

Celui du dynamisme intérieur, tout d’abord, avec un certain besoin de ressenti : brûle nous de ton feu, donne-nous la joie, l’espérance, ranime nos cœurs, donne nous le désir de la sainteté.

Si nous regardons en direction des Ecritures, il s’agit bien d’une œuvre essentielle de l’Esprit de Dieu. Nous avons dit que nous demandons à l’Esprit Saint l’élan et le dynamisme. Et en effet, l’Esprit est le Souffle de Dieu, celui qui donne vie et force à tout ce qui existe. Dès la Genèse, l’Esprit plane sur les eaux. Et le psaume 103 chante l’Esprit de Dieu : « Tu envoies ton souffle : ils sont créé : tu renouvelles la face de la terre ».

Si nous regardons maintenant le Christ lui-même, il est le sauveur, et l’Esprit qu’il nous a promis ne peut accomplir un autre salut que celui que Jésus donne lui-même. Comment se caractérise ce dynamisme spirituel dans la vie du Christ ? Il me semble que nous le voyons tout spécialement à l’œuvre quand Jésus appelle. Il appelle ses disciples : viens, suis-moi ! Il appelle aussi l’infirme : Lève-toi ! Il appelle en donnant un but, une mission : allez dans le monde entier, faites des disciples ! En appelant, Jésus donne la force de se mettre en route.

Oui, demandons donc ce matin à l’Esprit Saint l’élan et la force, qu’il vienne nous sortir de toute tiédeur, de toute torpeur, de toute lassitude. Souvent, l’Esprit Saint donne cette force au cœur même de la faiblesse.

C’est ce que l’on voit parfois chez certains grands malades qui, dans leur lutte jusqu’à la fin, font preuve d’un étonnant goût de vivre, d’un élan au cœur même de leur fragilité.

Nos demandes à l’Esprit Saint se déploient aussi dans un autre registre, celui de la conversion, de la transformation de notre être éprouvé par le mal, le péché, la maladie : nous prions ainsi l’Esprit Saint : fortifie nos corps blessés, lave-nous de tout péché, fais nous grandir en liberté, console-nous, redresse-nous, purifie-nous.

Là encore, il s’agit d’une œuvre de l’Esprit de Dieu que nous découvrons dans les Ecritures, en particulier chez les prophètes. Dieu dit, par la bouche d’Ezékiel : « Je répandrai sur vous une eau pure, et vous serez purifiés ; de toutes vos souillures, de toutes vos idoles, je vous purifierai. Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau. » (Ez 36, 25-26).

Le Christ lui-même a accompli de nombreuses guérisons dans son ministère. Il réalise ce qu’annonçait Isaïe et que décrit saint Luc : « les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés et les sourds entendent, les morts ressuscitent, la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres » (Lc 7, 22) Mais ces guérisons physiques sont inséparables d’une transformation spirituelle, celle de la foi et du pardon des péchés. Aussi, le jour de la Résurrection, Jésus souffle sur ses apôtres et leur donne l’Esprit Saint pour pardonner les péchés.

Oui, demandons ce matin à l’Esprit Saint la sainteté, la sanctification de tout notre être, de ce qui est encore blessé, faussé et qui a besoin d’être lavé, en nos cœurs. C’est dans notre fragilité humaine que l’Esprit, humblement, vient faire son œuvre ; une œuvre qui est marquée par la Passion, la mort et la résurrection du Christ.

Ces derniers temps, à l’abbaye, nous avons eu la grâce d’accueillir beaucoup de jeunes, des adultes aussi, venant en retraite, et qui demandaient à recevoir le sacrement de la réconciliation et du pardon. Il est beau de voir comment l’Esprit Saint agit dans les cœurs pour les tourner avec confiance, avec espérance, vers le pardon de Dieu, vers Dieu qui fait miséricorde et qui nous invite à placer notre vie entière sous la miséricorde divine.

Nos demandes à l’Esprit Saint se caractérisent enfin par un troisième registre de prière, celui du discernement. Et nous prions ainsi l’Esprit : inspire nos paroles, fais nous éviter toute erreur, donne nous d’aimer en vérité, conduis-nous, conseille-nous. Nous demandons la lumière.

Là encore l’Esprit de Dieu, dans toute la Bible, se fait connaître comme l’Esprit de sagesse et de vérité. Le Seigneur le promet : « Je mettrai en vous mon esprit, je ferai que vous marchiez selon mes lois. » (Ez 36, 27) Et l’auteur de livre de la Sagesse dit à Dieu : « Et qui aurait connu ta volonté, si tu n’avais pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ? » (Sg 9, 17).

Jésus lui-même est le Chemin, la Vérité et la Vie. Il ouvre des disciples à la vérité toute entière en leur faisant connaître Dieu lui-même qui est le Père. Connaître le vrai Dieu, c’est plus que d’avoir quelques idées sur Dieu ou sur ses commandements, c’est avoir part à sa vie même, et c’est que veut accomplir en nous l’Esprit Saint, en nous unissant au Fils, afin que dans le Christ, nous soyons vraiment des enfants de Dieu. « Vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; et c’est en lui que nous crions Abba ! c’est-à-dire Père ! ».

Il nous arrive de rencontrer parfois des personnes qui ont une vraie sagesse. Ce ne sont pas nécessairement les gens les plus brillants, mais ceux chez qui sont étroitement unis l’intelligence et l’amour, la vérité et le cœur.

Ces demandes multiples s’orientent finalement dans trois directions : le dynamisme spirituel contre la tiédeur et l’inertie, la sainteté devant le péché sous toutes ses formes, la lumière face à l’erreur et au doute. Ce don, ce n’est pas de manière individuelle seulement que nous le demandons et que nous le recevons, mais comme le disait dans la liturgie, la prière d’ouverture de cette messe, le don de Dieu est pour toute l’Eglise, chez tous les peuples et dans toutes les nations. Car il est sans mesure, le don de l’Esprit. Amen !