6 juillet 2025 – XIVe dimanche du temps ordinaire
Frères et sœurs, chaque fois que nous entendons ce verset d’évangile « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux », à chaque fois, nous nous souvenons que nous avons et que nous serons encore invités à prier pour les vocations, vocations sacerdotales et religieuses. Certes notre monde a besoin d’hommes et de femmes consacrés. Mais ne s’agit-il pas d’une interprétation réductrice du propos de Jésus quand il déclare que « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux » ? Une interprétation réductrice quant aux personnes concernées par le message, c’est-à-dire que seuls certains seraient désignés comme étant des ouvriers ?
Or aucun de nous ne peut déléguer à un autre que nous-mêmes ce travail, cette ouvraison intérieure qu’est notre vie spirituelle. Les deux choses que le Seigneur demande de proclamer sont « Paix à cette maison » et « le Règne de Dieu s’est approché de vous ».
Ce Royaume de Dieu, il est où ? Ce Royaume de Dieu c’est quoi ? Est-il cette perspective d’un Paradis par-delà la mort ? Ce festin merveilleux auquel nous sommes invités et pendant lequel nous rencontrerons le Seigneur dans un face-à-face ? Cela voudrait dire qu’il nous faut attendre la fin des temps pour y participer ?
Or il me semble que non justement, l’insistance du Christ porte sur le fait que le Royaume, que le Règne de Dieu s’est approché de vous, s’est approché de nous, parce que nous pouvons en gouter les fruits dès maintenant. Ce Royaume il a aussi pour nom le Royaume de son Amour, amour qu’il nous dispense déjà ici et maintenant. Parce qu’il est déjà possible de vivre de son amour divin et de la présence de l’Esprit Saint dès aujourd’hui.
La proclamation « Paix à cette maison », cela peut nous renvoyer à notre intériorité, comme « Paix à notre demeure intérieure ». Notre âme est-elle en paix ou bien est-elle envahie par le ressentiment, la haine, le mépris, la jalousie, l’orgueil, le vin aigre qui s’oppose au vin doux du banquet des noces.
Voilà le vrai travail de l’ouvrier pour trouver une moisson abondante, désencombrer son cœur et son âme, lutter de toutes ses forces contre les assauts d’esprits mauvais qui étouffe et font dépérir. Le malin n’est pas à chercher trop loin bien souvent, moins chez le voisin qu’en nous. Avouons-le, le malin est bien chez nous ! Pourquoi ? Parce que le malin, a la place que nous lui laissons lâchement. Il nous assaille en raison même du pouvoir, de la liberté d’agir que nous lui laissons. Nous l’entendons chaque Mardi à l’office des complies et pourtant nous cédons : votre adversaire, le démon, comme un lion qui rugit, va et vient, à la recherche de sa proie. Résistez lui avec la force de la foi.[1]
Quand Jésus dit qu’il « nous envoie comme des agneaux au milieu des loups ». On peut comprendre cette image, cette comparaison, comme la précédente, des animaux rodeurs à la recherche d’une cible facile à appréhender, sans défense. L’agneau est bien le seul animal qui dispose d’aussi peu de moyen de défense : ni crocs ni griffes, ni bois ni cornes, et sa vitesse de déplacement est assez limitée. On peut aussi comprendre cette expression comme l’annonce d’un monde auquel les disciples sont envoyés, mais un monde vorace, affamé de fausse justice, de faux semblants. Un monde dans lequel la « raison du plus fort est toujours la meilleure » pour reprendre la fable du loup et de l’agneau de la Fontaine.
Mais surtout il est peut-être possible de comprendre cette expression des loups et de l’agneau comme « je vous envoie combattre vos loups intérieurs, ceux qui assaillent votre âme ». Si dans la période estivale qui s’ouvre vous aviez décidé de faire un peu plus de sport, de prendre un peu plus soin de vous, et un peu moins de votre « body summer » je vous propose le sport que tout chrétien est amené à pratiquer : le sport de combat.
Parce que dans la vie chrétienne est inclus le combat spirituel, et c’est un beau combat. Le but du combat spirituel est une croissance spirituelle dans l’amour, une charité plus vive, et une union plus profonde à Dieu. Certes comme le dit le Catéchisme de l’Eglise Catholique[2] : « Le Baptême, en donnant la vie de la grâce du Christ, efface le péché originel et retourne l’homme vers Dieu, mais les conséquences pour la nature, affaiblie et inclinée au mal, persistent dans l’homme et l’appellent au combat spirituel. ».
Aussi donne-nous de croire Seigneur que nous pouvons triompher de tout esprit mauvais, grâce à la puissance mystérieuse de ton Amour. Et réjouissons-nous frères et sœurs parce que nos noms sont inscrits dans les cieux. Ces noms, nos noms que Dieu connaît personnellement. C’est certainement là la source d’une paix profonde, celle-là même que Dieu nous offre quand nous le laissons pénétrer dans la maison de nos cœurs.
[1] 1 P 5, 8-9a
[2] § 405