Chanoines réguliers de Prémontré
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Mai
Écrit par f. Hugues

11 mai 2025 – IVe dimanche de Pâques

« Nous sommes… des moutons » : ce n’est pas moi qui le dis…, c’est Jésus : « Moi je connais mes brebis et elles me suivent » ; brebis ou mouton, c’est le même mot en hébreu et en grec, et c’est par ce mot que Jésus nous désigne dans l’évangile !

         Pourquoi Jésus compare-t-il notre relation à lui… à celle à de moutons/de brebis avec leur berger, leur pasteur ? D’autres comparaisons auraient pu paraître plus flatteuses…, d’autres animaux sembleraient plus nobles… Pourquoi nous comparer ainsi à des moutons ?

  1. « Moi je connais mes moutons/mes brebis et elles me suivent » dit Jésus : si Jésus emploie cette image, c’est tout d’abord parce qu’elle est classique dans les Saintes Écritures.      Cet animal, fréquent dans la Palestine de l’époque, appréciée pour sa laine et son lait, est déjà mis en avant par le prophète Ézéchiel par exemple : « ainsi parle le Seigneur Dieu : Voici que moi-même, je m’occuperai de mes brebis, et je veillerai sur elles » (Ez 34, 11).

     Les membres du peuple d’Israël sont déjà présentés comme les brebis/les moutons, dont Dieu est le véritable berger, le seul pasteur qui vaille. Si Jésus se présente comme le berger des moutons que nous sommes, c’est pour assumer cet attribut de Dieu, c’est déjà se révéler comme le Seigneur.

  • « Moi je connais mes moutons/mes brebis et elles me suivent » dit Jésus. Non des porcs, non des vaches mais des moutons, peut-être aussi parce que le mouton, la brebis, l’agneau, est l’animal par excellence que les croyants offrent en sacrifice au Temple de Jérusalem.

     Si Jésus nous guide comme un berger, c’est que nous devons, comme des moutons, être offerts en « sacrifice ». Ce mot paraît dur, inaudible pour certains… Mais le sacrifice ce n’est pas une recherche de la souffrance, elle arrive toute seule et assez vite… Le sacrifice, selon saint Augustin (un auteur très apprécié du nouveau pape), c’est « toute œuvre bonne qui contribue à nous unir à Dieu en une sainte société » (Ciu. 10, 6).

     Nous devons être comme ces brebis qu’élève le berger en vue des sacrifices ; Dieu s’occupe de nous (parfois discrètement il est vrai…) pour que nous puissions accomplir des œuvres bonnes qui nous unissent à lui et aux autres. Voilà les sacrifices auxquels le berger prépare ses moutons : aider notre frère en difficulté/soutenir l’ami dans la peine/supporter ses propres faiblesses. Peut-être pourrions chacun nous engager cette semaine à vivre un tel sacrifice, telle ou telle bonne action qui fait grandir l’unité.

  • « Moi je connais mes moutons/mes brebis et elles me suivent » dit Jésus. Non des chevaux, non des chameaux, mais des moutons, peut-être aussi parce que le mouton est l’animal grégaire par excellence, un animal qui vit en troupeau. Une caractéristique des moutons – c’est ce qu’on retient dans les expressions « moutons de Panurge », « suivre comme un mouton… » –, c’est de toujours se suivre, d’être unis dans tout ce qu’ils font.

     C’est bien aussi pour cela que Jésus nous qualifie de moutons/de brebis : nous ne sommes pas des individus qui suivons chacun de notre côté Jésus, mais nous formons un « troupeau » qu’on appelle l’Église, comme Jésus le dit lui-même : « il y aura un seul troupeau et un seul pasteur » (Jn 10, 16).

     La récente élection du pape nous a fait voir fortement l’unité de ce troupeau, l’unité de cette Église, qui répandue par toute la terre, était unie dans l’attente, est unie dans la joie. Mais cette unité est toujours à cultiver, à préserver, sans faire prévaloir ses préférences, sans attendre que le nouveau pape fasse ce qui est bien pour nous, pour notre intérêt particulier ; en acceptant d’appartenir à un troupeau dont nous ne maîtrisons pas le chemin, que nous suivons dans la confiance.

     La récente élection du pape nous rappelle aussi l’importance de ce ministère de pasteur suprême de l’Église, aujourd’hui confié à Léon XIV. Il y a certes un seul pasteur, le Christ, mais il s’associe des pasteurs, les évêques, les prêtres ; comme le relève saint Augustin « il y a un unique pasteur, le Christ, mais ils sont pasteurs parce qu’ils sont membres de cet unique Pasteur » (In Ioh. 46, 5) ; membres unies à leur tête, membres qui garantissent l’unité.

  • « Moi je connais mes moutons/mes brebis et elles me suivent » dit Jésus. Si nous pouvons être comme ces moutons, ces brebis unies, c’est que notre berger, Jésus, a lui-même été comme un agneau : c’est d’abord lui que Jean-Baptiste appelle « l’agneau de Dieu » ; c’est d’abord lui qui s’est offert sur la Croix à l’heure où on offrait le sacrifice de l’agneau pascal ; c’est d’abord lui qui nous a montré que le vrai sacrifice, c’est de donner sa vie par amour pour les autres. Lui que l’Apocalypse présente comme l’agneau vainqueur qui a versé son sang (Ap 7).

         Dans quelques instants, nous entendrons : « voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui enlève les péchés du monde » et nous communierons à cet Agneau, à notre Bon berger :

– que cette communion fasse grandir notre amour du Bon pasteur, Jésus qui a donné sa vie pour nous ;

– que cette communion fasse croître en nous le désir de l’unité de l’Église autour de ses pasteurs, unie à son nouveau pasteur suprême Léon XIV ;

– que communion renouvelle notre vocation au sacrifice, à l’offrande de nous-mêmes dans l’amour de Dieu et du prochain… un amour au-delà de toute comparaison !